The Yellow Shark (1993)
2 - Dog Breath Variations 2:07
3 - Uncle Meat 3:24
4 - Outrage At Valdez 3:27
5 - Times Beach II 7:30
6 - III Revised 1:45
7 - The Girl In The Magnesium Dress 4:33
8 - Be-Bop Tango 3:43
9 - Ruth Is Sleeping 5:56
10 - None Of The Above 2:16
11 - Pentagon Afternoon 2:27
12 - Questi Cazzi Di Piccione 3:03
13 - Times Beach III 4:25
14 - Food Gathering In Post-Industrial America, 1992 2:48
15 - Welcome To The United States 6:42
16 - Pound For A Brown 2:12
17 - Exercise #4 1:37
18 - Get Whitey 7:00
19 - G-Spot Tornado 5:17
Dernier coup d'éclat d'un génie fatigué. "The Yellow shark" parait en 1993, juste avant que Frank Zappa ne passe de l'autre côté de cette barrière qui nous terrorise tous quoiqu'on en dise.
Bouffé par cette saloperie de crabe, Zappa tourne un visage amaigri et grave sur la photo de pochette et pourtant, l'homme n'a jamais été aussi heureux car il vient d'accomplir son rêve de gosse : devenir chef d'orchestre.
"The Yellow Shark" est un album de musique contemporaine joué par 26 musiciens avec Frank Zappa comme conducteur d'orchestre.
Très exactement un mois et deux jours après nous avoir effectué cette dernière livraison, Frank Zappa tire sa révérence à seulement 53 ans.
Le discours d'"Intro" de Zappa déclenche quelques rires dans la salle. Si la voix semble un tantinet fatiguée par la maladie, l'humour est toujours là. Des cuivres grondent sur "Dog Breath Variations", deux minutes
pendant lesquelles tout devient possible dans un monde dessiné par Zappa. "Uncle Meat" offre un panorama en technicolor d'une musique emphatique et grandiose portée à son terme par une salve d'applaudissements d'un public
déjà en extase.
Arrêtons-nous déjà sur le superbe "Outrage At Valdez", qui se déroule comme une BO de film des années 60. L'atmosphère envoûtante de ce titre écarte les murs de la salle et privilégie les grands espaces.
"Times Beach II" se révèle beaucoup plus difficile d'accès. Epurés à l'extrême, les cuivres jouent en pointillé et les bois se frayent un chemin jusqu'à nos tympans de manière subversive.
Court plongeon dans les ténèbres avec "III Revised", aux violons torturés puis "The Girl In The Magnesium Dress" poursuit dans cette veine inquiétante mais toujours subtile, comme des dominos poussés
après avoir été savamment installés.
"Be-Bop Tango" offre une partition mouvementée récompensée par une salve d'applaudissements comme d'ailleurs chaque morceau qui reccueillent tous l'approbation bruyante et nourrie de l'assistance en présence.
Le piano prend la parole sur "Ruth Is Sleeping" dans un déluge de notes. Seul, l'instrument de marbre noir cultive l'intelligence d'une composition difficile et prenante.
Drame et obscurité avec "None Of The Above" où l'on s'attend à voir débouler Max Schreck peu après avoir aperçu son ombre menaçante. "Pentagon Afternoon" se place en retrait comme un animal prêt à bondir et entretient l'angoisse
teintée d'une ironie toute nouvelle.
On peut également se laisser emporter par la frénésie de "Questi Cazzi Di Piccione" ou être gagné par la suite de "Times Beach II", "Times Beach III" avec des bois laissés à l'abandon par les cuivres de la partie précédente.
"Food Gathering In Post-Industrial America, 1992" est raconté par un Zappa convaincu de son propos. Plus happening que musique, ce titre est mis en scène avec des musiciens soufflant dans des didgeridoos immergés
tout en jouant avec des pistolets laser en plastique.
Retour à la musique avec "Welcome To The United States". Un discours de Zappa vante les mérites des US avec un discours dopé aux interventions multiples d'une fanfare aux couleurs vives. Pendant près de 7 minutes, Zappa
nous accueille dans son pays. Plus guilleret, l'enchanteur "Pound For A Brown" fait sonner bois et cuivres dans une courte promenade champêtre avant de passer sur l'encore plus court "Exercise #4" dans la même veine.
La raison et l'intelligence parviennent à triompher avec le très beau "Get Whitey", égrené comme à l'intérieur d'un sablier et dosé juste comme il faut.
"G-Spot Tornado" referme ce catalogue d'images avec brio, dans une débauche d'effets.
Plus de 2 minutes d'applaudissements non stop viennent pleuvoir et récompenser cette oeuvre.
Juste avant de passer de l'autre côté, Zappa laisse une trace indélébile dans la musique contemporaine et remet les compteurs à zéro.
Grandiose.