Hammersmith Odeon (2010)

Hammersmith Odeon frank zappa

Disque 1

1 - Purple Lagoon 2:18
2 - Dancin’ Fool 3:42
3 - Peaches En Regalia 2:36
4 - The Torture Never Stops 13:52
5 - Tryin’ To Grow A Chin 3:37
6 - City Of Tiny Lites 7:01
7 - Baby Snakes 1:53
8 - A Pound For A Brown 20:39

Disque 2

1 - I Have Been In You 13:51
2 - Flakes 6:39
3 - Broken Hearts Are For Assholes 3:53
4 - Punky’s Whips 10:25
5 - Titties & Beer 4:49
6 - Audience Participation 3:31
7 - Black Page #2 2:49
8 - Jones Crusher 3:00
9 - The Little House I Used To Live In 7:08

Disque 3

1 - Dong Work For Yuda 2:54
2 - Bobby Brown 4:54
3 - Envelopes 2:15
4 - Terry Firma 4:10
5 -Disco Boy 6:42
6 - King Kong 10:10
7 - Watermelon In Easter Hay (prequel) 3:55
8 - Dinah Moe Humm 6:10
9 - Camarillo Brillo 3:23
10 - Muffin Man 6:17
11 - Black Napkins 5:15
12 - San Ber’dino 5:54

Les disques posthumes de Frank Zappa viennent inlassablement combler des lacunes en s'insérant dans la discographie déjà très fournie du moustachu. Chaque année, la famille Zappa ouvre la malle au trésor à archives du musicien de génie disparu bien trop tôt. En 2010, 3 albums atterriront dans les bacs dont ce triple CD "Hammersmith Odeon".

Il s'agit d'une prise live captée en janvier et février 1978 à Londres. Les trois rondelles alignent près de 3 heures de concert.

Le casting de l'équipe est impressionnant et réunit le gratin de l'époque : Terry Bozzio (batterie), Adrian Belew (chant et guitare), Peter Wolf (claviers et chant) ou encore le très ronronnant Patrick O'Hearn à la basse.
De nombreux morceaux de "Sheik Yerbouti" le live qui sortira en 1979 sont déjà présents sur celui-ci.
Rien que de plus normal puisque il s'agit de la même tournée.

Sur un tempo tout ce qu'il y a de plus martial, "Purple Lagoon" (que l'on retrouve par ailleurs sur "Zappa in New-York" dans une version un peu plus complète) ouvre les hostilités avec une présentation du groupe par Zappa himself. Comme son nom l'indique "Dancin’ Fool" investit la piste avec un morceau groovy et tendance pour l'époque. Encore un "petit" morceau avant d'attaquer le gros oeuvre avec "Peaches En Regalia", un instrumental aux claviers datés qui ouvre "Hot Rats" dans une version un peu plus longue et aboutie. Une nouvelle version de "The Torture Never Stops" dont on ne compte plus les reprises ici et là, sur les nombreux lives pondus par le maître. Précisons tout de même que l'original se trouve sur "Zoot Allures".

Cette version n'a rien a envier aux autres. Laissant une part non négligeable à l'improvisation, le titre n'en demeure pas moins bordé à l'extrême avec des musiciens conscients de l'enjeu de l'interprétation d'un tel classique. Le solo qui s'enclenche aux alentours de la 6ème minute ne ressemble pas à ceux que l'on peut trouver par exemple sur "The Best Band You Never Heard In Your Life" ou sur "You Can Do That On Stage Anymore Vol 4". A chaque reprise, l'occasion est donnée de faire quelque chose de nouveau. Le final est aéré à la 12ème minute, histoire de respirer jusqu'à l'ultime mesure. Ensuite, nous avons droit à "Tryin’ To Grow A Chin" dans une version similaire à celle figurant sur "Sheik Yerbouti", c'est-à-dire une pop survitaminée qui va vous coiffer les cheveux en arrière pour un bon moment. Hyper rapide, "City Of Tiny Lites" atteint la perfection live. Le solo décliné en polyrythmie impressionnant de maîtrise en rajoute une couche dans l'admiration que l'on peut avoir pour un tel titre. Un excellent moment de ce premier tome.

Avant d'entamer le gros morceau de cette rondelle, Zappa fait un détour par le sautillant "Baby Snakes" de l'album du même nom dans une portion congrue de moins de 2 minutes. Choeurs surf et piano rythmique anime le bazar. Pour terminer cette première galette rien de tel que "A Pound For A Brown". Assez linéaire, "A Pound For A Brown" est en fait une suite de solos de claviers. Le long morceau instrumental commence comme le soleil se lève dans les dessins animés.
Le titre démarre avec un solo de vibraphone qui installe l'ensemble dans la sphère jazz. La guitare, grande absente de ces premières minutes, laisse sa place à divers claviers. A la 6ème minute, c'est justement un de ceux-là qui prend le relais, suivi par le piano à près de la moitié du morceau. A la 14ème minute, le soleil se couche et le morceau plonge dans le théâtre contemporain pour un passage rempli de cris et de fureur. On nage en plein psychédélisme, les instruments marquant le pas. La fin est presque progressive, comme pourrait le faire une partition de Rush à la même époque.

Le début de la deuxième galette se fait en douceur. "I Have Been In You" démarre sur un rythme lent mais encore trop rapide pour Zappa qui demande à son groupe de ralentir encore le tempo. Le morceau de 3 minutes de "Sheik Yerbouti" s'étire sur dix minutes de plus. Zappa a donc tout le loisir de se moquer de Peter Frampton et de raconter l'histoire sulfureuse de cette chanson dans un long monologue. Eloge de la lenteur et de l'immobilisme, "I Have Been In You" s'adresse avant tout à ceux qui maîtrisent suffisamment l'anglais pour comprendre les subtilités du texte.

"Flakes" est quasiment la copie conforme de la version figurant sur "Sheik Yerbouti". Le morceau vaut surtout pour le plendide solo exécuté par un Adrian Belew en état de grâce. Une histoire de trou du cul chère à Zappa "Broken Hearts Are For Assholes". Le titre se partage entre moments de furie rock'n roll avec une pause dej à mi-parcours. La chose est assez prenante pour nous faire passer près de 4 minutes à la vitesse de l'éclair.

Superbe "Punky’s Whips" qui prend des allures de BOF dès la deuxième minute. Véritable mini opéra, ce titre complexe sort des atouts de sa manche avec, en final, un superbe solo bien rock. Un morceau de bravoure à écouter en boucle !

"Titties & Beer" est surtout l'occasion pour Zappa de jouer avec son batteur, Terry Bozzio. Complètement improvisé, le dialogue des deux musiciens montre la complicité qui régnait dans les diverses formations de Zappa. Passons au funk avec "Audience Participation" où Zappa sollicite le public sur fond de groove en boucle. A la toute fin 1,2,3,4 et "Black Page #2" débute dans une débauche de puissance. Même si le son du synthé fait un peu daté, la virtuosité de Terry Bozzio fait un boulot monstrueux sur cet instrumental jazz. Ramené à 50% de la durée annoncée sur "Zappa in New-York", "Black Page #2" laisse sa place à "Jones Crusher" dans une formule rapide rythm'n blues. Le cocotier bien secoué laisse la scène libre et propre pour le dernier titre de cette deuxième rondelle. Issu de "Burnt Weeny Sandwich", l'expérimental "The Little House I Used To Live In" distille son atmosphère particulière faite de piano et d'hésitation. Orienté jazz sur la seconde partie, le titre se place sur un plan supérieur, hors d'atteinte du commun des mortels. Une bien belle façon de terminer cette deuxième galette.

L'ultime disque révèle douze titres. L'ouverture se fait avec "Dong Work For Yuda" disponible sur "Joe's Garage". Ce gospel années 50 réchauffe et introduit la ballade "Bobby Brown". Celle-ci débute par un long monologue de 2 minutes et se poursuit bras autour des épaules pour un "slow" aux paroles fleuries. Au passage, Zappa en profite pour parler de trois "trous du cul", à savoir les journalistes qui lui ont inspiré la chanson. "Envelopes", d'inspiration Wagnérienne, opère un virage à 180° pour un titre court, emphatique et emballé dans de la soie rouge et noire.

Animé par le chef frappeur Terry Bozzio, "Terry Firma" est un grand solo de batterie miné par quelques effets au synthé. Très étonnant dans un album de Zappa, ce solo se révèle moins pénible que d'autres essais dans le même genre. Il sert aussi de prélude au rock soutenu de "Disco Boy". Zappa en profite pour présenter ses musiciens, ce qui augure d'une fin de concert imminente. C'est déjà le moment des rappels. Ceux-ci débutent avec le fabuleux "King Kong" que l'on retrouve par exemple sur "Uncle Meat" puis sur "You Can't Do That on Stage Anymore, Vol. 1".

Cette version n'a plus grand-chose à voir avec l'original de 1969. Exit les cuivres et bonjour les claviers. La guitare, elle, reste omniprésente et triomphe de tout le reste dans une débauche qui couvre plus de la moitié de l'instrumental, partagé avec le clavier au son de piano.

Tonique et très rock, ce "King Kong" mérite un franc détour et demeure la perle de ce troisième tome.
"Watermelon In Easter Hay", présent sur "Joe's Garage" ne représente que la moitié du morceau figurant sur cet album. Véritable petite perle sonique, cet instrumental délicatement ouvragé est un modèle de finesse et de simplicité. Ce moment de grâce fugitif est bien (trop) vite remplacé par "Dinah Moe Humm" vivifiant et tonique. Présente sur "Baby Snakes", cette chanson se termine par un petit laius de Zappa.

Morceau d'ouverture de "Over nite Sensation", "Camarillo Brillo" n'a jamais été aussi rapide. La fin plus calme et posée que l'original montre l'évolution du moustachu depuis 5 ans que ce morceau est sorti. Dans la continuité et pratiquement sans rupture, "Muffin Man", éjecté de "Bongo Fury", découvre un rock franc du collier assorti d'un solo qui ne l'est pas moins. Ce titre est suivi par une minute pleine d'applaudissements, le temps que Zappa présente "Black Napkins". Ce blues instrumental est déjà présent sur un grand nombre de live du bonhomme. Pourtant, on ne s'en lasse pas.
La fin se profile déjà avec "San Ber’dino" rock et vif argent, un final en feu d'artifice avec explosion de solo de guitares.

Un live qui sélectionne des morceaux haut en couleurs. Même si la somme est colossale (2h53), elle n'est jamais ennuyeuse et offre des moments de bravoure à graver dans le marbre.

Excellent live à commander et à recommander.